LA MYASTHENIE (Myasthenia gravis)
memento

Philippe PUECH

Définition



Affection neuro musculaire caractérisée par une faiblesse et une fatigabilité des muscles squelettiques.

Physiopathologie


Synapse
Physiologie :
  • Synthèse de l'AcetylCholine dans la terminaison pré-synaptique axonale. L'ACh est stockée dans des vésicules qui sont libérées dans la fente synaptique lors d'un stimulus (potentiel d'action).
  • Récepteurs à l'AcetylCholine en partie post-synaptique. La fixation d'ACh entraîne l'ouverture de canaux Na+, ce qui génère une dépolarisation de la plaque motrice et donc la propagation de l'influx nerveux.

  • Myasthénie :
  • Baisse du nombre de récepteurs à l'AcetylCholine
  • Aplatissement des replis membranaires
    Conséquence :
  • Altération de la transmission neuromusculaire
  • Faiblesse de la contraction musculaire
  • Lors de stimulations nerveuses répétées, la quantité d'ACh libérée diminue progressivement. C'est l' "épuisement présynaptique", un phénomène physiologique.
    Dans la myasthénie, ce phénomène existe aussi et est amplifié. C'est la "fatigabilité myasthénique" (cf figure 1).
    Cette fatigabilité myasthénique est facilement détectable par répétition des stimuli lors d'un test électromyographique (EMG).

    Le message est interrompu par l'action de l'acetylcholinestérase. L'ACh est réabsorbé dans la terminaison axonale pour être régénéré.

    Mécanisme auto-immun


    Systèmique

    La myasthénie est une maladie auto-immune caractérisée par la présence d'Anticorps (Ac) dirigés contre le récepteur de l'AcetylCholine. (AcAChR)
    Le mécanisme déclenchant la synthèse de ces auto-Ac est à ce jour mal connu.
    Il semble que le Thymus joue un rôle important car on retrouve chez les patients myasthéniques :
    Une hyperplasie thymique ou des centres germinatifs actifs (65%)
    Un thymome (10%)
    C'est à dire une anomalie thymique chez 75% des myasthéniques.
    Les cellules pseudo-musculaires (myoïdes) ont à leur surface des Récepteurs à ACh qui pourraient servir d'auto-Ag et déclencher la réaction auto-immune thymique.

    Moléculaire
    3 possibilités sont évoquées
    Anticorps

    1. La liaison de l'Ac sur le site récepteur faciliterait la destruction du récepteur à ACh.
    2. L'Ac bloque le site actif du récepteur. Le récepteur est donc bloqué et ne peut plus recevoir ACh.
    3. L'activation du complément participe à détruire la membrane post-synaptique.

    Signes cliniques


  • Maladie fréquente : 1/10000
    A tout âge MAIS fréquence maximale : Femme de 25 ans
    Homme 55 ans
    3 femmes pour 2 hommes
  • Examen clinique :
    "Faiblesse et fatigabilité vraies" :
  • augmentées lors des efforts répétés
  • augmentées en fin de journée
  • diminuées quelquefois lors du sommeil ou du repos

    Atteinte PRÉCOCE =
    Muscles de la face ("les petits muscles")
    - palpébraux ptosis
    - oculo-moteurs diplopie
    - masticateurs difficulté à manger de la viande
    - faciaux expression "sévère" lors du sourire (signe de la faiblesse musculaire)
    - langue dysarthrie
    - voile du palais voix nasonnée
    troubles de la déglutition/fausses routes

    Atteinte généralisée dans 85% des cas (souvent plus tard) : Muscles PROXIMAUX en particulier; atteinte souvent ASYMÉTRIQUE
    PERSISTANCE DES REFLEXES OSTÉO-TENDINEUX
    Atteinte diaphragmatique possible+++
    exemple : déficit des extenseurs de la nuque chute de tête

  • "Crise" myasthénique :
    Lorsque le trouble de déglutition ou ventilatoire nécessite une assistance ou une intubation.
    Infections, Maladies de système la provoquent et dans tous les cas aggravent la myasthénie.

    Evolution :



    Par POUSSÉES suivies de RÉMISSION pendant les 5 premières années. Les rémissions sont rarement complètes.

    Maladies associées :
    Penser aux LED, pemphigus, Gougerot-Sjögren, thyroïdite, anémie de BIERMER, PAR.

    Classification de PATTEN :
    Groupe I : Myasthénie OCULAIRE
    ptosis, diplopie, mortalité nulle
    Groupe II : Myasthénie généralisée
    A : bénigne : Extension aux autres muscles mais pas d'att.resp
    B : modérée : Dysarthrie, dysphagie, gêne mastication, pas d'att.resp.
    C : sévère : tableau aigu fulminant (6 mois) ou progression brutale. Mauvaise réponse au trt et mauvais pronostic.

    Diagnostic et évaluation

    Clinique :

    Faiblesse , fatigabilité, localisation caractéristique; ROT normaux ; Sensibilité normale ; pas d'autre signe neurologique.

    Test aux anticholinestérasiques
    Baisse la destruction synaptique de ACh (à défaut d'augmenter le nombre de récepteurs !)
    Donc ils augmentent la force musculaire des myasthéniques.
    test

    EMG

    Stimulation répétitive toutes les 5 s; détection des potentiels évoqués.
    Si existe myasthénie ; Réponse décrémentée de 10 à 15%

    Dosage plasmatique des Ac anti récepteur ACh
    Permettent un diagnostic positif si on détecte leur présence. Leur absence n'élimine PAS le diagnostic de myasthénie car seulement 80% ont des Ac en phase généralisée et seulement 50% en phase légère avec atteinte oculaire.
    Leur titre ne prédit pas de la gravité mais est un bon élément de suivi thérapeutique.
    Diagnostic différentiel

    Bilan obligatoire

    Après confirmation du diagnostic, un certain nombre d'examens est nécessaire pour orienter la stratégie thérapeutique :

    Traitement de la maladie

    Très efficace même s'il n'est pas étiologique
    Vie socio professionnelle possible

    AntiCholinestérasiques
    Traitement symptomatique
    Pyridostigmine p.o délai 1 heure durée 3 à 4 heures
    =MESTINON cp à 60mg 2 à 15/j
    au début 60 mg * 3 ou *5 ; à adapter selon la nécessité
    Forme L.P : Jamais de jour car absorbsion non homogène
    Dose maximale nécessaire n'excède jamais 120mg / 3h

    Ambénonium p.o délai 30 minutes durée 4 à 6 heures
    =MYTELASE cp à 10mg 3 à 10/j en 4 à 6 prises

    Néostigmine p.o délai 1 heure durée 2 à 3 heures
    =PROSTIGMINE cp à 15 mg 5 à 10/j
    peu utilisé

    ATTENTION :
    CI : Asthme, Obstruction mécanique vésicale ou intest., M. de PARKINSON
    surdosage = AGGRAVATION de la myasthénie; possible CRISE resp.
    effets secondaires muscariniques -m.lisse- (diarrhée, crampe abdo, nausées, hypersalivation,bradycardie) stoppables par l'atropine.
    effets secondaires nicotiniques - m.strié - (Fasciculations, cramps, faiblesse, vivacité ROT) NON antagonisés par l'atropine.

    Thymectomie
    Traitement de fond à long terme Ablation d'un thymome (10% des cas) ou chirurgie radicale à but thérapeutique. Systématique dans la première année, même en l'absence de thymome, sauf si myasthénie du groupe I.
    Parmi les sujets opérés :
    85% des cas : amélioration
    35 % des cas : ne nécessitent plus d'autre traitement.
    Délai : 2 mois dans 50% des cas; jusqu'à 10 ans.
    Avantage : à long terme
    Indication : Myasthénie généralisée de la puberté à 55 ans. Avant et après : controversé.

    Immunosuppression
    Traitement de fond Indication : Ã conditions La corticothérapie offre le meilleur résultat parmi les trts médicaux

    trt

    Les autres immunosupresseurs
    - corticothérapie inefficace
    - échec ou CI de la thymectomie

    v Azathioprine = IMUREL : inocuité; permet de baisser les GC; 10% mal toléré
    50 mg/j pour tester l'absence d'intolérance
    augmenter ensuite jusque 1000 lymphocytes/ml
    (sauf corticothérapie)
    2 à 3 mg/kg/j
    Délai 3 à 6 mois
    v CICLOSPORINE : Difficile à manier ; Néphrotoxicité; Toxicité hémato.; à réserver si intolérance à l'IMUREL .
    v Cyclophosphamide = ENDOXAN

    Plasmaphérèse

    Traitement symptomatique ponctuel
    But : Baisser le taux des Ac Anti Récepteur ACh
    Amélioration clinique TRANSITOIRE !
    Indication : Pré-Thymectomie.
    Poussée sévère
    Ce n'est PAS un traitement de fond.

    Discutés
    Ciclosporine Gammaglobulines Sérum anti lymphocytaire Sérum anti thymocyte Aldactone

    Traitement de la crise
    Risque : Défaillance respiratoire aigüe par
  • atteinte du diaphragme
  • atteinte des muscles intercostaux
    Hospitalisation en unité de soins intensifs
    Monitorage respiratoire et cardiaque

    Déclenchée par :

    Médicaments à éviter
    @ = CI Absolue sinon CI Relative
    ATB : Polymixines@ , aminosides@, tétracyclines, lincosamines
    AArythmiques : beta bloquants@, quinidine@, procaïnamide@, lidocaïne
    AEpileptiques : Triméthadone@
    Psychotropes : BZP, IMAO
    Autres : D-Pénicillamine@, hh Thyr, Mg et Ca inj., Quinine @ (SCHWEPPES), sérum antitétanique, contraceptifs oraux, progestérone, hypokaliémiants (RÉGLISSE), moutarde.